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Capsule théorique sur les situations de conflits ou de tensions
Je tiens d’abord à préciser que j’utilise le terme conflit dans un sens générique. On pourrait aussi pour dire désaccord, tension ou malaise.
Cela fait drôle à dire, mais il est « normal » de vivre, à l’occasion, des conflits ou des tensions avec un parent. Vouloir les éviter ou les fuir ne peut que les exacerber. Peu importe vos intentions ou vos habiletés, vous aurez tous à composer avec des situations où un parent vous exprimera, quelques fois avec intensité, un désaccord ou une colère.
Considérant que la collaboration-école-famille (CÉF) se construit principalement au sein de la triade « Enseignant-Parents-Élève » (E-P-É), si un conflit survient, il est inévitable que les titulaires aient à s’impliquer dans les communications. À cet égard, le chercheur canadien Peter Coleman (1998) a mis en évidence que la construction de liens significatifs entre enfant, enseignant et parent facilite la résolution de conflit.
Bien que les titulaires jouent un rôle clé dans la gestion des conflits avec les parents, il est primordial que ces derniers puissent compter à l’occasion sur du soutien au sein de l’école. La chercheuse américaine Anne Henderson et ses collègues (2007) affirment qu’un bon système de CÉF dans une école prévoit d’ailleurs une démarche de résolution des conflits et des désaccords qui surviennent entre parent et enseignant. Cette démarche précise la chaine de communication, les responsabilités de chacun et les mécanismes de médiation au sein de l’école.
Les types de conflits
Ma collègue Jacynthe Cantin, avec qui j’ai réalisé le premier balado de la série École-Famille-Profs-Parents, identifie 2 types de conflits : les conflits ponctuels et les conflits plus profonds, plus ancrés.
Les conflits ponctuels avec un parent sont souvent associés à un évènement récent survenu à l’école. Ils peuvent être exprimés avec intensité et être résolus en faisant appel à des techniques de résolution de problème. En ce qui a trait aux conflits plus profonds, ils résultent souvent d’un cumul d’évènements survenus dans le passé et auprès de plusieurs intervenants. La résolution de ces conflits est possible, mais demandera plus de temps, car elle nécessite la construction d’un climat de confiance et, quelques fois, le courage de se dire et d’entendre les « vraies choses » ou de poser les « vraies questions ».
Les sources de conflits entre parents et enseignants!
Un regard global sur les situations où j’ai joué un rôle de médiateur et sur les nombreux incidents critiques de CÉF vécus par mes étudiantes me permet de constater que les sources de conflits entre parents et enseignants sont de trois ordres : organisationnel, éducatif et pédagogique.
Bien que largement valorisée, il n’en demeure pas moins que la fréquentation scolaire d’un enfant pose un défi d’organisation tant pour les parents que pour les enseignants. Au fil « des diners à préparer, des espadrilles pour l’éducation physique à prévoir, des signatures pour les sorties, des achats de cartables rouges et verts », etc., il est possible qu’émergent quelques tensions. Habituellement, ces tensions ne sont pas majeures, mais deviennent agaçantes à la longue.
La collaboration éducative est probablement la source la plus fréquente de tensions ou de conflits entre parents et enseignants. Un désaccord à l’égard d’une conséquence ou des exigences différentes sur l’attitude générale de l’enfant peuvent susciter énormément de tension dans les relations parents/enseignants. L’expérience m’indique qu’une différence de style d’autorité[1] chez l’enseignant et le parent est souvent un facteur menant à des conflits d’ordre éducatif.
Les conflits d’ordre pédagogique sont associés aux apprentissages scolaires. Un mauvais résultat, un soutien déficient, un désaccord sur les capacités de l’élève sont des exemples de différends possibles. La résolution de ces situations passe par des échanges empathiques où enseignant et parent expliquent leurs points de vue. Le besoin de l’enfant-élève sera assurément un facteur de rapprochement
Possible à résoudre, mais tout de même pas facile à vivre
Bien qu’il soit possible de trouver des solutions satisfaisantes aux conflits qui pourraient survenir dans vos relations avec les parents, il n’en demeure pas moins que cela vous place, presque toujours, dans une zone de communication délicate. La colère, le doute, la tristesse, la déception… seront possiblement au rendez-vous. À cet égard, j’aborde toujours avec mes étudiantes le principe du « ne pas le prendre personnel ». Vous n’agissez pas à titre personnel, vos actions découlent d’un cadre professionnel que vous devez respecter : les programmes, le code de vie, le collectif d’une classe, etc.
L’équilibre dans la gestion de vos émotions se trouve, en partie, dans votre capacité d’établir une saine « distanciation » dans vos communications avec les parents. Considérant votre statut professionnel, il est important de démonter de l’empathie dans vos échanges avec ces derniers. Toutefois, cette ouverture à l’autre, cette considération des propos du parent ne doit pas tomber dans une zone de proximité qui serait équivalente à celle de vos échanges avec vos proches. Cette distanciation, qu’il ne faut pas confondre avec froideur, contribue à notre calme et à notre objectivité lors de communication tendue.
Étant d’une nature très conciliante et venant d’une culture où les conflits étaient souvent balayés sous le tapis, il m’est souvent arrivé de tourner autour du pot lors de rencontres avec des parents. Mes collègues enseignants me disaient souvent « Ouais, ce n’était pas vraiment clair notre message ». Au fil de temps, à travers plusieurs échanges d’objectivation avec mes pairs, j’ai réalisé l’importance du « courage de dire ». Comme le dit l’enseignante Geneviève Poitras: « Dire clairement les choses, ça fait mal, mais moins longtemps que de ne rien dire ».
Il est normal de vivre des doutes et quelques insécurités à l’égard des communications délicates avec certains parents de vos élèves. Le partage avec des pairs enseignants ou avec des PNE peut contribuer au développement de votre sentiment d’efficacité dans vos communications avec les parents. Il sera sage dans certaines situations de rencontrer les parents en équipe. Il faut toutefois éviter de placer un parent devant un mur d’intervenants. La présence d’une ou deux personnes avec vous me semble correcte. Selon le contexte, ce soutien pourra venir de la direction, d’un PNE, de l’orthopédagogue, d’un TES.
Chaque situation permet d’apprendre
Bien qu’elles ne soient pas agréables, il est tout à fait possible de traverser positivement les situations de conflits avec les parents. Il s’agit bien sûr de situations où vous devez mobiliser plusieurs ressources de votre coffre à outils de communication. Chaque situation que vous vivrez constitue une occasion de développer votre habileté à intervenir dans les relations délicates avec un parent. Des questions de base devraient suivre ces moments délicats. Quelle était mon intention? L’ai-je atteint? Qu’est-ce qui a fonctionné? Qu’est qui n’a pas fonctionné? Qu’est-ce que j’ai trouvé difficile? Quels ajustements pourrais-je faire une prochaine fois?
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